Relevé général, restauration des appartements et de l’aile « Sarcus »
Dans un haut-lieu du XVIIe siècle, l’héritage du XIXe siècle redécouvert
En 1665, Roger de Rabutin, bretteur turbulent, homme de guerre et homme de lettres, esprit brillant d’une rare causticité, est exilé par Louis XIV pour avoir osé écrire sous le manteau une satire des mœurs de la cour du jeune Roi-Soleil. Il se retire en son château de Bussy – un édifice d’origine médiévale embelli à la renaissance, et dont il achève les travaux de la façade principale en 1649. Dans sa retraite forcée, il poursuit son œuvre épistolaire et fait décorer ses appartements de façon très personnelle. Après la rupture révolutionnaire, les propriétaires de Bussy se sont efforcés de reconstituer l’héritage foncier, artistique et littéraire de Roger de Rabutin, avant le rachat du domaine par l’État au début du XXe siècle. Il est aujourd’hui géré par le Centre des Monuments Nationaux.
Le château de Bussy-Rabutin, labellisé « maison des Illustres », a été retenu en 2018 pour la mission Bern sur le patrimoine.
L’aile dite « Sarcus », et la moitié nord du corps de logis ont été mises au goût du jour lors de campagnes successives aux XVIIe, XVIIIe, puis XIXe siècle (en deux fois). Après la vente à l’État, l’intérêt pour Bussy se focalisant sur les appartements à grands décors, ces parties ont été délaissées et, rapidement dégradées, restèrent fermées au public. Conscient de ce potentiel, le Centre des Monuments Nationaux a engagé un vaste projet de restauration.
La présente étude est une révélation : derrière la dernière mise en peinture uniforme, les sondages stratigraphiques ont permis de retrouver des ensembles complets de décors à faux-marbre, témoins du goût des propriétaires du XIXe siècle. La liaison des appartements avec les parties servantes (cuisine et annexes) témoigne d’une recherche accrue du confort, de l’efficacité et de la discrétion du service. C’est ainsi toute l’évolution des goûts et des usages qui se révèle dans ces parties oubliées du château. De plus, ces appartements révèlent une part de l’histoire patrimoniale du château : en les aménageant pour leur vie quotidienne, les propriétaires ont assuré la conservation des grands décors du XVIIe siècle qui occupent l’autre moitié du château.
Les études en cours : affiner la connaissance
Plusieurs opérations sont menées de front :
- Un relevé général du site et de l’édifice afin de constituer une documentation graphique complète qui avait toujours fait défaut jusqu’ici : numérisation par trois scanners laser, production d’ortho-images des décors, plans, coupes et élévations géométrales ; l’ensemble du réseau hydraulique des jardins est également relevé et les débits admissibles sont passés au calcul afin d’anticiper les conséquences de fortes intempéries.
- Un diagnostic et une mission de maîtrise d’œuvre pour la restauration complète des parties dites « Sarcus » aujourd’hui fermées au public. Il s’agit d’étendre la visite suivant un circuit entièrement repensé, de restaurer les décors des appartements du XIXe siècle, d’ouvrir les espaces Renaissance de la galerie et de la tour nord-ouest à l’accueil d’expositions. Les études sont en cours en 2019.
L’atout de la pluridisciplinarité
Les équipes de l’agence ont mutualisé leurs moyens techniques et leurs compétences en relevé par scanner laser avec Raphaël Drizard, architecte, bénéficié du savoir-faire de TT Géomètre pour les aspects topographiques et hydrologiques, avec l’appui de l’entreprise de maçonnerie VARET pour l’accès aux ouvrages enterrés. Le diagnostic a quant à lui mobilisé les compétences d’historien de Philippe Dufieux, de restaurateurs de décors (Art-SA), de bureaux d’études techniques structure (UBC) et fluides (Alternet) : la pluridisciplinarité au service du monument historique trouve ici sa pleine expression.
De nouveaux moyens pour la conservation
La restauration des parties « Sarcus » est engagée sur plusieurs années, l’ouverture à la visite d’une première tranche étant prévue en 2020. L’exploitation du relevé pourra également se déployer en plusieurs années vers d’autres aspects du château désormais documentés, tel l’ensemble exceptionnel d’enduits anciens des façades sur les douves, qui rassemblent un véritable florilège des techniques décoratives à faux appareil.